Le titre de cet article cite Ingrid Astier. Selon la romancière invitée à l’émission Des Mots de Minuit #548 avec Matei Visniec, l’entame de ses romans est souvent un fait divers qui fonctionne comme un appât, une invitation à imaginer-vivre-raconter tout le reste.
Mais certains écrivains se tourmentent au sujet de leur première phrase, qui n’est plus seulement l’entame du roman, mais le saint-début, la mise-en-bouche dont ils connaissent l’enjeu capital… et qu’ils peinent à trouver. C’est bien ce qu’a compris le marchand de premières phrases, ce personnage extraordinaire qui aborde avec son discours de bonimenteur un écrivain esseulé :
« La première phrase d’un roman est le cri irréfléchi qui provoque l’avalanche… C’est l’étincelle qui déclenche la réaction en chaîne… Une première phrase n’est jamais innocente. Elle contient le germe de toute l’histoire, de toute l’intrigue. La première phrase est comme l’embryon de tous les possibles, comme un spermatozoïde chanceux, si vous voulez bien me permettre cette comparaison… Ha ha !… »
Au lecteur de découvrir quelle sera finalement cette fameuse première phrase que tout le roman recherche pour lui-même…
Dois-je préciser que cette émission est un véritable bonheur? Philippe Lefait prend le temps d’écouter la réponse aux questions qu’il pose. Alors il était logique qu’il ait envie de rencontrer Matei Visniec et de l’inviter: le romancier le dit de toutes les manières possibles: « notre monde ne jure que par les commencements ». A peine lance-t-il une action (ou une question ) qu’il passe à la suivante, dans une course effrénée à la jouissance du commencement…
Au détour de cette conversation, on entend parler de liberté (« transformer la liberté en civilisation, tel est le défi des citoyens roumains depuis presque trente ans), d’ironie (nécessaire, jusqu’à la limite du caustique), du lavage de cerveau auquel nous sommes benoîtement soumis (au sujet de sa pièce L’Homme poubelle : « on assiste à la transformation de l’homme en poubelle de la société de consommation: il avale tout, il accepte tout »), de gratitude aussi ( pour notre culture française qui lui a permis de résister quand il vivait encore du mauvais côté du rideau de fer et qui a accueilli ses œuvres jusqu’à les faire siennes).
Enfin, de la gratitude, il en est aussi question ici et maintenant, car Matei Visniec a l’élégance et la générosité d’évoquer le travail de sa traductrice. Ceux qui passent régulièrement sur ce blog se rendent compte (j’espère) de ce que peut être le travail du traducteur littéraire. Ils devinent peut-être aussi, au travers des longs silences du blog, les périodes difficiles, de recherche et de questionnement.
Mais je ne sais pas si j’ai déjà exprimé ici un « merci » à tous les écrivains dont j’ai traduit les livres et à ceux, aussi, dont je porte en ce moment les ouvrages en espérant les voir publiés bientôt. Alors je les remercie tout simplement d’exister et de créer.








Le Festival qui avait invité Romain Puertolas, François Weyergans, David Lodge, Patrick McGuiness, Guillermo Arriaga, en plus des auteurs roumains consacrés comme Mircea Cartarescu, Stefan Agopian ou Norman Manea? Ce Festival qui invitait aussi de nombreux traducteurs de littérature roumaine à se retrouver pour parler de leur merveilleux job et de tout ce qu’il restait encore à découvrir dans la littérature roumaine?
des coeurs légers », sous la plume de Doïna Ruşti, c’est Bucarest fin 18e, la ville de Bucur le joyeux. On y crée des parfums, on y danse. La réputation de ville des plaisirs et du luxe arrive aux oreilles de Ioanis Milikopu, qui vit encore chez ses parents à Salonique. Le jeune garçon, qui veut coudre les plus beaux tissus du monde entame alors un voyage hasardeux jusqu’à Bucarest…
us faisait battre le cœur plus vite. Les paroles évoquaient une ville qui exhalait le tilleul. Entre ses murs, toute souffrance s’évanouissait, elle était comme effacée du Livre de la Destinée – ou de ses innombrables copies.
ces, mais de ces fragrances toujours renouvelées, de ce souffle tiède qui vous envahissait tous les pores de la peau en vous effaçant la mémoire, si vous étiez nouveau venu. Alors vous n’aviez plus qu’une ambition, un seul destin, celui de devenir un émir aux yeux de saphir, un nabab menant grand équipage et recevant en son palais, ou alors un gouverneur, un colonel ou encore, et ce serait tout aussi merveilleux, un simple gratte-papier attaché à la suite princière…