La Correspondance de Marcel Proust 

Mihail Sebastian

Éditions Non Lieu
ISBN 978-2-35270-341-9

Je publie dans cette page consacrée à ma dernière traduction en date, de larges extraits de ma préface. J’espère qu’elle donnera envie de lire l’historique et très littéraire essai de Mihail Sebastian. 2023 aura donc été une année très riche, au cours de laquelle j’ai notamment travaillé à la rédaction de ce texte introductif et passé plusieurs semaines à compléter l’appareil de quelque 220 notes de bas de page datant de 1938, pour que tous les renvois aux lettres de Marcel Proust pointent vers l’édition actuelle, disponible, consultable par le lecteur: l’édition de Kolb en 21 volumes.

couverture de La correspondance de Marcel Proust

La publication de cet essai intitulé La correspondance de Marcel Proust a été saluée par plusieurs articles, par Yaël Pachet, pour En attendant Nadeau, par Cristina Hermeziu, qui a ouvert le bal, par Pierre Glachant, sur le Courrier des Balkans. Je tiens à saluer celui de Nicolas Ragonneau sur son site, bien connu de tous les proustiens, proustonomics.com.

 

Plus qu’une simple chronique du livre de Mihail Sebastian, Nicolas Ragonneau a rédigé une étude très intéressante et documentée, qui place l’ouvrage dans son contexte historique et éditorial. A la faveur de la publication du journal de guerre de Paul Morand (qui fut ambassadeur à Bucarest) et d’une biographie de la princesse Bibesco par Aude Terray, Nicolas Ragonneau trace une partie du portrait intellectuel de l’entre-deux-guerres en Roumanie. Les relents idéologiques les plus nauséabonds et les réalités les plus cruelles affleurent. Mihail Sebastian, dans son Journal, évoque, décrit. Mais, comme le souligne avec force Nicolas Ragonneau, ce Journal mérite une véritable édition, intégrale et dotée d’un appareil critique, pour que l’on connaisse enfin la véritable portée de son témoignage. Ces coupes(1) sont plus pernicieuses qu’elles ne le paraissent et vont bien au-delà des passages concernant Marcel Proust, et que j’ai repérés en rédigeant ma préface…

L’article de Nicolas Ragonneau est passionnant et instructif, comme dans cet extrait:

Lire ces trois ouvrages conjointement, en compagnie de quelques autres sur les sujets connexes que sont le fascisme et la Shoah en Roumanie, comme je l’ai fait ces dernières semaines, forme une expérience unique, éprouvante et hypnotique. Le texte que vous lisez est en quelque sorte le récit du voyage que j’ai fait dans la Roumanie des années 38–45 — sans jamais quitter mon bureau. J’y ai rencontré, dans le désordre de ces années d’apocalypse et surtout à Bucarest, Mihail Sebastian, Paul Morand, Elizabeth, Priscilla, Marthe, et Antoine Bibesco, le maréchal Antonescu, Emil Cioran, Mircea Eliade, Jacques Truelle, Hélène Soutzo, Serge Moscovici, Gabriel de La Rochefoucauld, Eugène Ionesco, les frères Radu et Şerban Cioculescu, Camil Petrescu, Norman Manea, Henry Spitzmuller, Jean Mouton et bien d’autres encore. J’allais oublier une vieille connaissance : Lucien Rebatet. Et puis, last but not least, une grande spécialiste de la Roumanie, Alexandra Laignel-Lavastine, qui n’est autre que la nièce de Christian Péchenard (un des biographes de Proust NDLR). Tous ces personnages, connus ou méconnus, amis ou simples lecteurs de Proust, sont reliés par des liens dont certains étaient apparents, connus, et d’autres à découvrir. Les ramifications sont innombrables. Des éléments obscurs ou incompréhensibles s’éclairent d’un jour nouveau, des brouilles et des lâchetés s’expliquent, des perspectives vertigineuses s’ouvrent… la scène se joue sur fond de massacres et de déportations qui ont coûté la vie à plus de 300000 juifs et 12000 Roms.

Ces derniers jours, j’ai ressorti le Livre noir de Matatias Carp sur la destruction des Juifs de Roumanie entre 1940 et 1944 : c’est vrai, le travail de mémoire en Roumanie ne fait que commencer. Peut-être vais-je me prendre par la main et écrire l’article prévu depuis des mois, sur le travail qu’entreprennent des écrivains, sous la houlette du Musée de la littérature roumaine de Iasi et de l’Institut national pour l’étude de l’Holocauste Elie Wiesel: il y a un recueil de 10 nouvelles sur le pogrom de Iasi.  C’est de la littérature, mais c’est une contribution historique. Je voudrais traduire ces textes. Il faudrait qu’un éditeur accepte de les publier, avec les 10 terribles photos de cette atrocité de juin 1941.

Je termine cette page qui décidément se rallonge et foisonne autour de la personnalité de Mihai Sebastian en vous confiant, comme promis, de larges extraits de la préface que j’ai eu l’honneur d’écrire pour présenter son texte :

« En 1938, à Bucarest, Mihail Sebastian publiait la toute première étude au monde de la correspondance de Marcel Proust, dont on avait recensé à l‘époque 1 200 lettres. L’écrivain juif roumain assimilé, fin lettré et grand lecteur de littérature française, fut le premier à rédiger un ouvrage de ce type. C’était seize ans après la mort de l’écrivain français qu’il admirait. Lui en avait trente-et-un, et le destin ne lui accorderait de vivre que jusqu’à l’âge de trente-huit ans.

Découvrir aujourd’hui en 2023 cet essai en français relève du miracle éditorial et témoigne de la vie crépusculaire et cachée de certains ouvrages. […] Cet ouvrage resté oublié durant plus de 80 ans, totalement inconnu des proustiens qui à travers le monde continuent d’étudier l’œuvre et la correspondance de Marcel Proust donne des repères essentiels pour tout lecteur qui n’aurait pas encore lu À la recherche du temps perdu et aurait besoin d’en identifier les enjeux, les thèmes, tout en apprenant à connaître les ressorts créatifs de Marcel Proust.

[…] Ce lecteur roumain parfaitement francophone, capable de lire Marcel Proust dans l’édition française originale mûrissait depuis longtemps son travail sur la correspondance de l’écrivain français. Auteur d’une très volumineuse œuvre critique publiée dans les journaux bucarestois de l’entre-deux-guerres, Mihail Sebastian lisait Proust depuis son adolescence (il avait 20 ans en 1927, à la publication du dernier tome de la Recherche), comme il lisait aussi passionnément Gide, Oscar Wilde, Stendhal, Virginia Woolf et James Joyce. Dans les années 1927-1930, tout jeune critique, il avait publié une série d’articles sur la Recherche et son auteur. En décembre 1929, il était parti pour Paris en train où il avait passé dix-huit mois entre découverte de la ville, études doctorales de droit et beaucoup, beaucoup d’écriture, y compris à Annecy, durant les vacances de l’été 1930… Et puis, le 3 août 1938, son Journal nous renseigne sur un moment décisif :

Ma chronique pour  Revista fundaţiilor et la correction des épreuves de ma Correspondance de Marcel Proust m’ont fait perdre deux jours, lundi et mardi.
[…] la publication de ce texte ne met pas un point final à sa complicité avec l’œuvre de l’écrivain français. Son journal en est la preuve. La longue fréquentation de l’œuvre de Proust transmue les expériences de vie de Mihail Sebastian. Parfois, le critique, le romancier, l’homme appréciant la vie agitée de la capitale roumaine où il observe et décrit les personnages de son époque se tance de n’avoir pas en société les réactions et la bienséance qu’auraient eu Marcel Proust !

Un jour de février 1939, Mihail Sebastian est en conversation avec un certain « comte de la Rochefoucauld » qui se fait appeler « monsieur de Norpois », sans que l’on sache si l’homme avait bien compris que le surnom choisi est celui du Norpois de la Recherche. Selon Mihail Sebastian, cela ne fait aucun doute, le faux diplomate plein de suffisance et ne parlant que par formules toutes faites « est un Norpois typique ». Malicieux, mais surtout intrigué, Mihail Sebastian est sur le point de demander à ce convive « s’il avait lu Proust […]. C’eut été bien entendu une goujaterie ». Lorsque l’homme déclare attendre avec impatience la victoire des nationalistes franquistes, Mihail Sebastian n’y tient plus :

[…] Outré, je lui ai fait remarquer que la France aurait dès lors encore une frontière à défendre. J’étais peut-être un peu trop agressif, irritant. Je le regrette. Je devrais apprendre à écouter calmement, poliment, sans réactions trop vives. Grands dieux ! Que n’ai-je au moins appris cela de la connaissance de Proust !

Ce passage est révélateur une fois de plus du maillage sensible qui relie l’écrivain français à Mihail Sebastian. Et d’autres exemples pourraient être convoqués. Mieux encore, c’est un élément du maillage social, donc externe qui renforce encore les liens entre nos deux écrivains : le prince roumain Antoine Bibesco, proche ami de Marcel Proust était revenu vivre à Bucarest en 1939, après une carrière diplomatique de Londres à Washington, en passant par Madrid. Dès 1937, c’est à un récital d’Enesco qu’ils assistent ensemble, c’est un « lunch » qu’ils partagent, à l’Athénée Palace, un des plus prestigieux hôtels de la capitale roumaine dans la belle architecture qui doit à cette ville son surnom de « petit Paris » : Mihail Sebastian amoureux de l’œuvre de Proust devient un très bon ami du meilleur ami de Proust.

Lorsque Sebastian est appelé sous les drapeaux en mai 1939, c’est dans le nord de Bucarest, sur les terres de la famille princière Bibesco, à Mogoşoaia. Alors que le romancier bovaryse et souhaite que le prince lui offre de l’héberger chez lui, lui permettant de continuer à écrire, le prince Bibesco lui envoie une invitation  à le rejoindre sur d’autres de ses terres, dans le sud de la Roumanie et joint à son courrier un ouvrage sur Proust, car il sait que son ami Mihail continue de s’y intéresser. […]

Quatre ans après la publication de sa Corespondenţa lui Marcel Proust, Mihail Sebastian est identifié, en Roumanie, comme le spécialiste de cet auteur. Le 30 juin 1943, le directeur de l’Institut français à Bucarest, Jean Mouton, lui remet au cours d’un dîner le manuscrit de son propre livre intitulé Le Style de Marcel Proust, qui sera publié à Paris en 1948 ; mais à cette date Mihail Sebastian aurait déjà quitté le terrain de toutes les recherches stylistiques de son cher Marcel Proust, ayant été renversé par un camion soviétique le 29 mai 1945…

Cette courte excursion à travers une partie de ce qui a intimement lié Proust à Sebastian (et quelle relation plus intime peut-on imaginer que celle qui s’établit entre l’écrivain et son lecteur sensible ?) nous explique pourquoi Mihail Sebastian a été celui qui, à plus de trois mille kilomètres de Paris a écrit la toute première étude de la correspondance de Marcel Proust. Il se base sur la première édition Plon dans la collection La Palatine en six volumes (1930-1936). Il procède avec méthode, et expose ses sources dans le premier chapitre. Avec finesse et logique, Mihail Sebastian sait bien qu’il travaille sur un corpus étroit, « évidemment bien loin [d’une] édition complète de la correspondance de Marcel Proust » et « cela ne peut nous empêcher d’étudier la matière dont nous disposons », affirme-t-il. L’essayiste regrette que n’existe pas à son époque une édition strictement chronologique de la correspondance, ce qui « nous aurait offert un tableau encore plus fidèle de la vie de Proust, de ses amitiés, des changements subis au fil du temps et aurait facilité les confrontations qui, dans l’édition mentionnée, sont difficiles à faire. » Sebastian sait qu’un proustien d’Amérique, Philip Kolb, prépare depuis 1936 une thèse sur la correspondance de Proust à l’Université de Harvard. Son souhait de chronologie sera exaucé par l’Américain, en effet, mais bien plus tard… au terme de plus de cinquante ans de recherches et sera publiée chez Plon en 21 volumes, de 1971 à 1993.

Mihail Sebastian traverse entre 1930 et 1936 l’immense corpus de lettres avec une grande finesse. Sa connaissance intime et juste de la Recherche lui permet d’établir des liens entre les missives et l’œuvre, pour nous éclairer sur la biographie de l’écrivain, sur les relations avec sa mère, sur la construction de l’œuvre, sur les scrupules d’ordre stylistique et moral que Marcel Proust exposait dans ses échanges avec ses divers correspondants. Sa grande proximité de l’œuvre lui permet de formuler des analyses qui conservent aujourd’hui toute leur actualité.

L’écrivain roumain de trente-et-un ans dans une Europe où résonnent bruits de bottes et discours munichois ne poursuivait pas le but d’une future et brillante Viviane Forrester ni d’un pénétrant Jean-Louis Baudry de la fin du XXe siècle. Non, le romancier, le critique, le publiciste dans la meilleure tradition des intellectuels roumains et européens (déchiré entre son identité juive et l’amour de sa patrie), grand connaisseur de littérature intime et de la correspondance des grands écrivains est ici, dans cette étude, le fin analyste d’un fait capital : pour Mihail Sebastian, la correspondance, « par sa richesse, par sa diversité nous ouvre un vaste champ de vision sur l’univers proustien. » Pas question de regretter comme certains critiques de Proust la piètre qualité stylistique des lettres envoyées à ses correspondants. […]

Il est frappant de saisir dans sa description de ce qu’il appelle « la poste courante de ce malade » une sorte de miroir à rebours de nos pratiques contemporaines. Cet « enfer épistolaire » (là, c’est Proust qui parle) fait soupirer Proust : « j’aurai des centaines de lettres à écrire », « mon dieu ! à plus de mille personnes, je dois des lettres ».

Un autre point attire notre attention dès les premières pages de l’étude : comme s’il répondait par avance aux objections largement exprimées, longtemps après lui, depuis les années 1960, Mihail Sebastian prend la défense de Marcel Proust :

Il serait trop facile et trop injuste de voir dans ces déclarations d’amour exclusif que Proust envoie parfois en même temps à deux ou trois personnes une preuve d’hypocrisie ou d’insincérité.

Après quelques lignes d’argumentation, il poursuit :

Même si les amitiés de Proust ne sont pas […] des affections profondes (et elles ne peuvent l’être, quand ses seules pensées sont la préparation de l’œuvre et l’attente de la mort), il y a dans sa présence aux personnes une intense soif d’intimité, qui reste finalement irréalisable, mais qui du moins est satisfaite par les petits accords momentanés, passagers, anesthésiques.
[…] Il serait facile de citer ici d’autres passages pénétrants, saisissants, qui m’ont touchée dès ma première lecture et pendant le temps de la traduction. La modestie, le tact de Mihail Sebastian sont remarquables. Il désamorce littéralement tous les écueils et tous les défauts : le voyeurisme, l’utilisation abusive des documents privés, le goût du sensationnel. Rien de tout cela n’a sa place dans cette lecture passionnément précise et honnête de la correspondance et de l’œuvre de l’écrivain admiré. La modestie : il sait bien que son étude se trouve au début du chemin exégétique qui sera parcouru par d’autres, avec d’autres sources, d’autres moyens d’analyse, d’autres ambitions. Le tact : « il n’existe aucune lettre d’amour dans toute la correspondance » écrit Sebastian (dans celle qu’il avait à sa disposition). « Pas une ligne ? C’est difficile à croire » reprend-il en effet. « Ici se cache une blessure morale, que non seulement la correspondance mais toute son œuvre tente de recouvrir. » Ses développements sur « l’irrégularité de [la] vie intime » de Marcel Proust contraint par son milieu et son éducation sont d’une justesse et d’une sensibilité criant l’évidence sans pour autant s’attirer les foudres moralistes de son époque. Mihail Sebastian a cette phrase d’un éclat particulier :

Proust ne peut avoir le désespoir de vagabond de Rimbaud, ni l’inconscience alcoolique de Verlaine, ni le cynisme d’esthète de Wilde, ni la sérénité grave, responsable, de Gide.
[…] Si cet essai de Mihail Sebastian avait eu le destin qu’il méritait, dès l’après-guerre, il aurait peut-être permis à quelques chercheurs de réaliser que la correspondance de Proust était bien le laboratoire de l’œuvre. Lui qui a vraiment lu toutes les lettres publiées à l’époque, lui qui en extrait un fil rouge et une connaissance encyclopédique tout en restant synthétique sait bien qu’elle fut aussi un champ d’expérimentation. […]

Mihail Sebastian n’oublie pas d’étudier « un des plus naïfs, des plus pittoresques et des plus émouvants chapitres de la correspondance de Marcel Proust » qui concerne sa stratégie littéraire. […] Puis il cite ce passage douloureux où Marcel Proust parle de son œuvre achevée: « D’autres que moi […] ont la jouissance de l’univers. Je n’ai plus ni le mouvement, ni la parole, ni la pensée, ni le simple bien-être de ne pas souffrir. […] Recroquevillé […] et privé de tout, je ne m’occupe plus que de [lui] fournir à travers le monde des esprits l’expansion qui m’est refusée. »

Mihail Sebastian, avec son style paisible mais aux formules sachant marquer les esprits se demande « si, dans la stratégie littéraire de Proust n’entrait pas plus d’abnégation et d’héroïsme que de simple vanité littéraire » et conclut que « dans leur simplicité lasse git une résignation de testament ».

L’écrivain roumain dont l’étude publiée ici pour la première fois en français est injustement absente de toutes les bibliographies actuelles a réussi, sur 90 grandes pages et sur la base de 1 200 lettres, à percevoir l’essentiel.

Ce travail remarquable de fluidité, de clarté, totalement dépourvu d’égo et sans débordement de la personnalité de Sebastian sur son objet de recherche est l’œuvre, dans l’oubli de soi, d’un écrivain pour un autre écrivain. Les effets de miroir nous éblouissent. Les pages sur la construction de l’œuvre, sous la plume de Sebastian, sont comme une conversation posthume avec le Maître, et une discussion comme à l’intérieur d’un cénacle littéraire, lorsque les participants évoquent de manière détachée des questions de composition…

Lorsque Sebastian traque dans les lettres de Marcel Proust des indices, rares, concernant son projet de roman, quand il suggère en s’appuyant sur une lettre à Robert Dreyfus que Sodome et Gomorrhe fut à l’origine un « projet de nouvelle » avant d’être incorporé au roman « comme un affluent entrant dans le cours d’un fleuve », on voit très bien qu’il perçoit ce mouvement de composition parce qu’il procède lui-même de cette manière dans ses propres livres, par accolement, supplément, gonflement de la matière narrative. Il est dans ces lignes davantage le confrère et le confident par-delà les ans, que l’exégète, le sociologue, le psychanalyste ou l’historien que seront nombre de spécialistes proustiens. Travail fascinant que d’observer la double réflexion des lettres de Proust dans son œuvre, et de l’œuvre adorée de Proust dans la pensée (réfléchie) de Mihail Sebastian.

La Correspondance de Marcel Proust entame, c’est un vœu, la carrière qu’il mérite pour entrer, enfin, dans les bibliographies proustiennes. […]

 

 

Au sujet du Journal de Mihai Sebastian : 

Elle est étonnante, l’histoire éditoriale que celle de ce petit chef-d’œuvre de la littérature autobiographique :  les cahiers de Mihail Sebastian furent sauvegardés après son décès via Israël et conservés par la famille française de Iosef Hechter – Mihail Sebastian (son nom de plume qu’il choisit en 1936 comme nom d’usage). Ils ont ensuite été conservés par Harry From, un réalisateur de film et producteur émigré aux États-Unis qui créa la Fondation Mihail Sebastian. C’est lui qui remit une copie des 9 cahiers du journal au directeur des éditions Humanitas, Gabriel Liiceanu, en 1994. L’édition Humanitas a été couronnée de plusieurs prix et le Jurnal s’est vendu très vite à plus de 100 000 exemplaires avant d’être traduit dans de nombreux pays. En France, le Journal (1935-1944) a été traduit par Alain Paruit, Stock, Paris, 2007. 

(1) Les coupes nombreuses et jamais signalées dans le texte furent justifiées dans une note finale du traducteur Alain Paruit : « des passages qui n’auraient pas été compréhensibles pour le lecteur français sans de longues notes sur des circonstances ou des personnages roumains de l’époque. »